La demande d’assurances crédit augmente

Selon le FMI, de multiples entreprises sont au bord de la faillite dans nombre de pays en raison de la pandémie. Les petites et moyennes entreprises (PME) sont particulièrement exposées. Beaucoup d’entre elles ne paraissent pas devoir survivre. Les assureurs spécialisés dans le crédit, dont la base d’affaires consiste à garantir les risques de crédit à court terme des entreprises, observent l’évolution d’un œil de lynx. Ce qui est décisif, c’est quand et de quelle manière les gouvernements supprimeront leurs mesures de soutien à l’économie. Une PME sur cinq menacée Dans les pays développés, estime le FME, quelque 20% des dettes de PME menacent de ne pas être remboursées à moyen terme, à un horizon de trois ans (voir graphique, barres rouges). Les PME ont une importance cruciale pour l’ensemble de l’économie : elles représentent 99% des entreprises, fournissent plus de 60% des postes de travail et génèrent plus de la moitié des chiffres d’affaires dans la plupart des économies nationales. Par rapport à de plus grandes entreprises en mesure d’émettre par exemple des actions ou des emprunts, les PME ont moins de possibilités de financement, de sorte que l’accès à une assurance crédit peut s’avérer vital pour elles en temps de crise. Part de l’endettement pour les entreprises à risque d’insolvabilité élevé dans les économies développées. Pourcentage de l’endettement total de toutes les entreprises dans ces segments L’assurance-crédit protège le fournisseur de biens ou de services contre le risque d’un paiement retardé ou d’un défaut de paiement par celui qui les acquiert. Traditionnellement, les PME sont de grandes clientes d’assurances crédit. Ce besoin d’assurance crédit résulte de la pratique courante de la vente à crédit, de l’exigence des acheteurs de travailler sur factures ouvertes où les biens et services ne sont payés qu’une fois déjà revendus, sans offrir de garanties. Au sein de l’UE, un cas d’insolvabilité sur quatre est à imputer au retard de paiement de l’acheteur. Durant la crise financière mondiale de 2008-2009, les revenus des assureurs crédit ont été affectés, parce que le grand nombre d’entreprises insolvables a entraîné une forte hausse des pertes. Les assureurs crédit ont été critiqués pour avoir aggravé le recul des activités commerciales pendant la crise. On leur a notamment reproché de biffer de manière généralisée les limites, d’augmenter à l’excès les taux de prime et de ne pas communiquer dans les règles ces modifications à leurs clients. Les Etats se précipitent dans la brèche Pour assurer l’existence d’assurances crédit en particulier pour les PME, des Etats ont conclu avec des réassureurs des contrats de type réassurance. De tels contrats font partie de toute une série de mesures par lesquelles les Etats protègent les entreprises des effets les plus délétères de la pandémie. Ce soutien ne s’adresse pas tant à l’assureur mais à l’entreprise assurée afin de la protéger elle, les emplois qu’elle assure, ses acheteurs et toutes ses chaines d’approvisionnement. Les contrats sont soumis à des taxes d’un taux différencié pour les primes et les sinistres et sont en principe liés au paiement d’une commission de réassurance. Ils couvrent en général des preneurs d’assurance autochtones ou domiciliés dans le pays et concernent l’ensemble du portefeuille effectif de l’assureur-crédit de même que ses nouvelles activités. A en croire un sondage d’ICISA (International Credit Insurance & Safety Association), la plupart des assureurs crédit ont signé un ou plusieurs contrats de soutien de l’Etat. La plupart de ces contrats ont été prorogés jusqu’au milieu de 2021. L’évolution des insolvabilités n’est pas liée à la récession Le FMI estime qu’en 2020 le PIB mondial a reculé de 3,3%. La récession aura ainsi été nettement plus violente que durant la crise financière mondiale. A l’encontre de toutes les attentes, selon les estimations d’Euler Hermes les insolvabilités d’entreprises ont diminué en 2020 de quelque 10%. La détresse économique causée par la crise à beaucoup d’entreprises ne reflète pas pour l’instant une hausse des insolvabilités d’entreprises. Une nouvelle étude de la Banque des règlements internationaux (BRI) évoque de ce fait une « lacune des faillites » entre les faillites attendues et les faillites effectives. Les adaptations des règles concernant la faillite dans bien des pays l’expliquent, tout comme l’abandon du devoir d’annonce de l’insolvabilité. Le fonctionnement normal du système de régulation des dettes a ainsi été provisoirement suspendu. A quoi s’ajoute que la pandémie a affecté l’économie de manière inégale. Même si elle a touché très durement les secteurs proches des consommateurs, d’autres secteurs moins affectés par les mesures contre la pandémie se sont nettement repris vers la fin de l’an dernier. En outre, la possibilité d’obtenir une compensation pour les chiffres d’affaires perdus a atténué la pression sur bon nombre d’entreprises. L’offre excédentaire de crédits, rendue possible par un soutien monétaire et fiscal jamais vu pour compenser les pertes à court terme, est une autre raison importante à l’origine du découplage des chiffres d’insolvabilité de la récession. Le fort endettement et les faibles prévisions de bénéfice constatés qui lui sont liés dans certains secteurs suggèrent que l’octroi de crédits a certes retardé mais pas supprimé le défaut de paiement de certaines entreprises. Préparation incertaine à la reprise graduelle de l’économie On ne saurait dire comment la situation évoluera quand les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales supprimeront les multiples mesures de soutien à l’économie et quand les contrats avec les assureurs crédit arriveront à échéance. Une levée soudaine ou en ordre dispersé des mesures de soutien économique recèle le danger d’un choc imprévu et d’une aggravation de la situation que ces mesures étaient censées éviter. Seule une réduction organisée et coordonnée décidera de leur succès final. Selon un sondage d’ICISA, 95% des assureurs crédit s’attendent à une hausse de la demande d’assurances crédit en 2021. La plupart des membres d’ICISA s’attendent également à une augmentation notable des insolvabilités d’entreprises et donc des sinistres en cas de suppression des mesures de soutien étatiques à l’économie. Pour les assureurs crédit, il s’agit d’être particulièrement attentif à leurs engagements tout en veillant à leur réputation qui pourrait pâtir s’ils se mettaient à réduire de manière générale leurs limites de crédit. Note : Les PME telles qu’habituellement définies dans l’UE et aux Etats-Unis ont une fortune inférieure à 50 millions de dollars et sont ici comptées par le FMI parmi les petites entreprises (« petites »). Les entreprises « moyennes » annoncent un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions de dollars, tandis que celui des « grandes » entreprises se situe au-dessus de 500 millions de dollars.

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