Cette situation n’est souvent pas envisagée par l’entrepreneur. En cas de décès de l’actionnaire, les héritiers ou proches peuvent toutefois se trouver dans des situations compliquées pouvant mettre en péril la conduite de la société.

Succession légale à défaut de disposition pour cause de mort

A défaut d’avoir disposé pour cause de mort, par testament ou pacte successoral, les dispositions du Code civil réglant la succession s’appliquent. L’ensemble du patrimoine privé et commercial de l’entrepreneur entre dans la succession. Les héritiers légaux deviennent immédiatement propriétaires de l’entreprise, selon la règle du « mort saisit le vif ». Il existe alors un risque sérieux que l’hoirie ne soit pas capable d’assumer la reprise des activités du défunt, par manque de temps, d’éloignement géographique ou d’inexpérience. L’hoirie doit en effet prendre les décisions à l’unanimité et des conflits entre les héritiers peuvent conduire au blocage du fonctionnement de la société et de la prise de décisions opérationnelles pouvant aller jusqu’à la liquidation ou à la vente de l’entreprise.

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Auteure
Mélanie Erb-Zimet, experte fiscale diplômée, Banque Bonhôte, Neuchâtel.

En cas de bonne entente des héritiers, le partage successoral peut résulter en l’obligation par un héritier de dédommager les autres, entraînant des conséquences financières qui peuvent être importantes en fonction de la valeur de la société. En effet, les actions de la société, illiquides, peuvent représenter une part significative du patrimoine à partager.

Quelles solutions mettre en œuvre

Le nouveau droit des successions entré en vigueur le 1er janvier 2023 permet d’organiser la succession de manière plus stratégique qu’auparavant. En effet, l’une des principales nouveautés de la réforme est la réduction de la part réservataire des enfants ainsi que la suppression de la réserve héréditaire des parents, permettant ainsi à l’entrepreneur d’attribuer les actions à un seul héritier, voire à un tiers, par disposition pour cause de mort.

A ces fins, il est judicieux pour l’actionnaire de discuter en amont de la transmission de l’entreprise avec les héritiers et de conclure un pacte successoral afin d’assurer que sa volonté soit respectée et non contestée par ces derniers en cas de décès. Cette procédure doit être en principe accompagnée d’une méthode de valorisation de la société, à inscrire dans le pacte successoral, de même que de la répartition d’autres éléments du patrimoine (liquidités, immeubles, etc.) de manière à éviter la lésion des réserves héréditaires.

Hors du cercle des héritiers légaux, il est également possible de conclure une convention d’actionnaires prévoyant des modalités de transfert des actions en cas de décès de l’un d’eux, par exemple en octroyant un droit de préemption aux actionnaires contre les héritiers, afin d’assurer le maintien de l’actionnariat existant tout en prévoyant le versement d’une compensation financière aux héritiers.

Ne pas négliger les aspects fiscaux

Ces questions de droit civil s’accompagnent bien entendu d’une analyse des aspects fiscaux. En effet, le taux de l’impôt sur les successions, de droit cantonal, dépend de la proximité du défunt avec l’héritier. Si l’héritier des actions de l’entreprise est un tiers, par hypothèse un cadre dirigeant de l’entreprise, le taux de l’impôt pourrait approcher les 50% selon le canton de domicile du défunt. Ainsi, un héritier pourrait se voir contraindre à répudier la succession à défaut de pouvoir s’acquitter de l’impôt. A noter aussi que des aspects fiscaux de droit étranger pourraient surgir si l’héritier est domicilié dans un Etat qui perçoit les droits de succession auprès de ce dernier en application sa législation domestique, par exemple la France.